Lille, premier centre Cnam en région : de 1952 à 2022
Si, dès sa création en 1794, l’ambition du fondateur du Cnam, l’Abbé Henri-Grégoire, était de « présenter les moyens de perfectionner l’industrie nationale », ce n’est véritablement qu’à partir des années 50 que le Conservatoire commence à se constituer en réseau.
70 ans plus tard, le déploiement s’organise autour de 13 centres en métropole, 7 en Outre-mer et 5 à l’étranger. Plus de 230 lieux d’enseignement répondent aujourd’hui aux besoins des auditeurs et des territoires.
Tout commence en 1951, lorsque le recteur de Lille souhaite faire évoluer les cours de « Promotion du travail », déjà des cours du soir, dispensés à l’École nationale des arts et métiers (Ensam) en annexe du Cnam de Paris. L’année suivante, son vœu est exaucé : le ministère en charge de la formation professionnelle publie le décret 52-908 du 25 juillet 1952 relatif à la création des centres régionaux associés au Conservatoire national des arts et métiers.
Lille devient le terrain d’expérimentation de cette mise en place, suivi par Lyon dès l’année suivante. Il faudra cependant attendre fin septembre 1953 pour voir apparaître la toute première promotion du Cnam lillois.
Huit ans après la fin de la Seconde Guerre mondiale, ce projet de croissance régionale du Cnam doit permettre de soutenir l’industrialisation et la modernisation du pays, et de former des centaines de nouveaux techniciens et ingénieurs.
À Lille, les premiers publics sont très masculins, et les enseignements exclusivement techniques, tournés vers la chimie, l’électronique, l’électrotechnique et l’automatisme. Un peu de plasturgie, de métallurgie et de génie civil viennent compléter les formations en place, mais à la marge. « Dès son ouverture, le Cnam a apporté quelque chose de nouveau », souligne Juliette Vallée, la toute nouvelle directrice du Cnam Hauts-de-France. « Plus de 1000 élèves par an se déplaçaient le soir et le samedi jusque dans les locaux du bâtiment historique des Arts et Métiers du boulevard Louis XIV pour profiter des cours et s’élever dans l’échelle sociale », ajoute-t-elle. Les enseignements sont alors dispensés par les enseignants de l’Ensam, mais aussi largement par des ingénieurs et cadres techniques des grosses usines de la région (textile, automobile, métallurgie).
En 1962, le Cnam Paris crée même une chaire Génie chimique à la demande des professionnels lillois pour le traitement des matières plastiques.
L’ensemble du dispositif constitue un formidable outil de montée en compétences pour les ouvriers et techniciens supérieurs de l’industrie locale.
Le tournant de la fin des années 90
Plus de 35 ans après les premiers cours, Lille est devenu le plus grand centre du Cnam en région. Cependant, les enseignements techniques commencent à décliner au profit des spécialités du secteur tertiaire. La désindustrialisation d’un côté, l’émergence de la société des services de l’autre, viennent bouleverser les habitudes faute d’auditoire pour les sciences dures.
Trois instituts parisiens du Cnam se déploient alors : l’Intec pour la comptabilité et l’audit, l’ICSV pour le commerce et la vente, et le Cestes pour l’économie sociale. « Cette évolution n’est pas un hasard », confie Élisabeth Gronier, directrice territoriale centre Nord-Pas-de-Calais. « Lille est la plateforme européenne et internationale d’un certain nombre de groupes de prestations, bancaires en particulier, comme les LCL et CIC européens. La demande en compétences est importante. Le centre Cnam s’adapte au gré des mutations du profil économique de la région. » C’est dans cette perspective que les cours du jour prennent leur essor au début des années 2000, notamment avec le magister QSE et les diplômes d’établissement du secteur de la santé. Les premiers alternants, pour leur part, sont arrivés en 2005 avec les licences en assurance et en RH, et les premiers apprentis ont été accueillis il y a tout juste trois ans dans plus d’une dizaine de spécialités. En 2010, les cours du jour sont majoritaires, et se généralise alors la formation à distance qui remplace peu à peu les cours du soir.
L’avenir s’annonce radieux
70 ans après sa création, le centre Cnam de Lille, et avec lui les Hauts-de-France, n’en a pas terminé avec les défis. Dans le cadre du développement de la voiture électrique, une troisième giga-usine de batteries électriques va s’implanter en France, à Dunkerque, avec à la clé 1200 emplois directs et 3000 indirects (démarrage des travaux en 2023). Et il est déjà écrit que la « vallée de la batterie » ne se fera pas sans le Cnam national, relayé par son antenne régionale. Des contacts sont déjà en cours pour imaginer des cursus permettant de former les uns ou de perfectionner les autres.
Par ailleurs, dans le cadre du programme Au cœur des territoires (2019-2023), qui voit le Cnam accroître son maillage territorial, cette fois en direction des villes moyennes (222 communes bénéficiaires), le Cnam HDF bénéficie de l’ouverture de plusieurs antennes pour développer ses enseignements – Arras, Beauvais, Château-Thierry, Compiègne, Creil, Laon-Saint-Quentin et Maubeuge – autour de 6 grands domaines directement en connexion avec les préoccupations économiques régionales : industrie du futur, maintenance industrielle, logistique et e-commerce, tertiaire, entrepreneuriat et informatique.
Ajoutons à cela le développement d’un pôle sécurité-défense qui doit entre autres construire dans les Hauts-de-France un bac+1 « Middle Management », le premier échelon d’encadrement des métiers de la sécurité (sport, événementiel, supermarchés).
À 70 ans, le centre Cnam de Lille n’est pas près de prendre sa retraite… pas plus que ses confrères partout en France !